Je pensais que ça arriverait jamais. Mais ça y est. C’est les retrouvailles du secondaire.

Y’a eu cette chanson-là, qui a joué à la radio, et qui m’a ramenée exactement au moment où j’avais 17 ans.

Toute seule, dans mon char de maman au sol décoré de cheerios.

Les cheveux au vent, comme dans le temps de ma Hyundai-accent-manuelle-deux-portes-un-lecteur-cd, la liberté.

Je me trouvais ben hot avec mon auto, pour foxer mes cours.

J’avais tellement hâte de grandir. D’être enfin une adulte. D’avoir la paix.

Sans me douter que ce temps-là allait me manquer.

Le temps où j’avais des amis qui s’appelaient »tortue »,  »la toast » pis »néné ».

Le temps où mon plus gros problème c’était de s’avoir si il allait rester une place pour m’assoir dans la café, après avoir attendu 45 minutes en ligne au micro-onde.

J’étais tellement loin de me douter à quel point ces souvenirs-là allaient valoir cher dans mon cœur plus tard.

Si seulement j’avais compris dans ce temps-là que j’avais la vie devant moi.

Dire que le monde m’appartenait pis que je le savais même pas.

J’avais choisi un programme presqu’au hasard au CÉGEP, j’avais aucune idée de ce que je voulais faire de ma vie.

Je pensais savoir c’était quoi l’amour.

En plein au cœur de ma première relation, je pensais que ça allait durer toujours.

J’avais aucune idée des peines qui m’attendaient dans le détour. Des montagnes que j’allais devoir monter à genoux.

Pis que j’allais redescendre en pleine face.

Je voulais changer le monde.

Aujourd’hui je le sais que c’est une mission trop grosse pour juste deux petites épaules.

Ça fait 10 ans.

10 ans qu’Umbrella de Rihanna jouait dans toutes les radios à répétition.

10 ans, mais c’est juste aujourd’hui que les paroles que je chantais dans le temps prennent du sens.

10 ans.

Aujourd’hui, j’ai plutôt des amies qui s’appellent »maman ».

Je sais pas si la toast a eu des enfants.

Mais quand je repense à cette période de ma vie, celle que j’avais si hâte de pouvoir enfin mettre derrière moi, ça me fait sourire.

Énormément.

Pis là c’est les retrouvailles de tout ce beau monde-là dans quelques jours.

Et je suis là, à me demander si je vais faire un tour.

Ou si je suis mieux de garder dans ma tête tous ces précieux souvenirs intacts.

De la fois où je me suis cassé la cheville en jouant au volley ball dans le gymnase, pis de celle où y’a fallu que quelqu’un me ramène sur ses épaules de la sortie en ski de fond parce que je m’étais encore plantée. Des voyages organisés par l’école dans l’ouest canadien. Et de la fois où j’ai foncé dans un arbre et brisé ma planche à neige à ma première descente à Banff, parce que j’observais le paysage.

Des sleep-over, des échanges de vêtements.

De la fois où quelqu’un avait écrit »stacose » à la place de »c’est à cause » dans sa production écrite.

Et qu’il y a une fille qui s’était percé le nez dans la salle de bain.

Pis qu’il y avait une autre fille qui ne s’est habillé qu’en rose. De la tête aux pieds, pendant des années. (Allo Jade, je sais que tu me lis.)

Des heures passées au téléphone ou sur msn, à se dire rien de plus que ce qu’on s’étaient déjà dit dans le jour.

Des premières peines d’amour, mais surtout des peines d’amitiés.

Des tournois de flag football annuels, où on s’appelait les »autruches maléfiques » pis qu’on avait la plus nice des bannières que j’avais faite chez moi avec mon beau-père. Mon  beau-père qui nous avait surpris avec trois bières pour 6 filles dans ma chambre. Parce que la toast avait accidentellement cogné deux bouteilles ensemble. Pis qu’y avait appelé chacun des parents de mes amies un après l’autre : la honte.

Mon beau-père qui est décédé au tout début de mon quatrième secondaire.

Et puis de toute cette petite communauté tricotée serrée de laquelle je faisais partie, qui m’a soutenue. Comme la fois, l’année d’après, où y’a quelqu’un qui a fait un oral sur le suicide, en son hommage. Pis que j’ai pleuré comme un bébé.

Je sais pas si sans chacune des personnes de cette gang là, je m’en serrais sortie aussi bien.

J’ai peur de tout gâcher ces précieux souvenirs-là, si je vais aux retrouvailles.

D’un coup qu’ils sont plus si drôles que ça. D’un coup que je me sens pas bien.

Que j’ai l’impression de pas avoir rapport.

Ça me briserait beaucoup trop le cœur. Y’aurait juste pas de façon de recoller les morceaux de mon passé, dans le fond je suis peut-être mieux de continuer de l’idéaliser, pis de m’y réfugier quand ça fait du bien.

Author: l’Emmèredeuse

L’emMÈREdeuse, c’est moi : Catherine.
Maman de deux (petits monstres) adorables garçons : Tom le dresseur de loups et Henri le Bébé Loup.
Je suis copropriétaire d’une famille recomposée remplie d’amour et de folie.
Ma plume prend parfois des chemins humoristiques, parfois des plus sérieux, mais toujours ceux de l’authenticité et de l’humilité.
Maman Louve à mes heures. Je partage avec vous les petits et grands moments de mon quotidien de maman.
De maman ben ordinaire.
Qui travaille à temps plein … Pis qui fait son gros possible.