Pour ce dernier bébé que je n’aurai jamais eu.

J’ai dit que c’était correct. Que c’était décidé pis que j’en voulais pu.

Ça fait un an presque de ça, et jusqu’ici je m’y tenais.

Ça me faisait pu mal en dedans quand j’y pensais.

Puis arrive la date d’accouchement prévue que j’avais, pour mon dernier bébé étoile.

On le désirait tant.

J’ai toujours imaginé que j’aurais trois enfants.

Même la voyante me l’avait dit.

Trois garçons ça me plaisait.

Il aurait eu 3 ans la semaine prochaine.

Auguste qu’on avait décidé de l’appeler.

On avait déjà choisi sa marraine.

Je lui avait choisi une tuque grise minuscule avec petits pompons de fourrure.

On aurait dit deux oreilles d’ourson.

J’ai rêvé que j’étais enceinte cette nuit-là, y’a quelques jours.

Et je me suis réveillée le lendemain l’âme meurtrie.

Le ventre tellement vide.

J’ai laissé les larmes couler.

Je les ai accueillies.

Je les ai respectées.

Elles avaient raison d’être.

Même après tout ce temps.

Je me suis imaginée ce que serait notre vie avec trois garçons.

Il aurait trois ans, le pire serait derrière nous. Déjà.

J’avais ma minivan de maman.

On avait choisi cette maison-ci parce qu’il y avait assez de chambre pour tout le monde à l’étage.

Mais il ne sera jamais rentré avec nous ici.

Je me suis imaginée son petit visage pour la première fois.

Quel aurait été le son de sa voix.

Est-ce qu’il ressemblerait à Henri ou à Thomas ?

Ou bien simplement à lui.

Et j’ai compris.

Je ne voulais pu d’autre bébé.

Je voulais mon bébé.

Celui que j’avais perdu.

Celui que mon corps n’avait pas su retenir.

Celui dont le souvenir faisait encore briser mon coeur en mille morceaux.

Un si petit bébé, gros comme le bout de mon doigt.

Né dans un bain au lait de lavande.

Si petit.

Mais déjà tout à moi.

Auguste.

Mes trois garçons, mes trois petits rois.

Je pensais que mon deuil de lui était fait.

Depuis le temps.

Il n’avait partagé ma vie que quelques semaines, mais il avait connu la chaleur de mon corps, il avaient entendu mon coeur battre de l’intérieur.

Il avait été mon bébé.

Je m’étais imaginé toute une vie avec lui.

Ça faisait si mal dernièrement, que j’ai commencé à parler de lui, chose que je n’avais jamais vraiment fait.

J’ai partagé son nom et la date qu’il devait naître.

J’ai ressenti le malaise des autres. Mais je l’ai toléré.

Et si on se réessayait pour un bébé ?

Non, ce ne serait pas lui.

J’imagine que c’est normal de remettre en doute ses décisions, surtout celles prises par la tête, puisque la vie n’est pas linéaire.

Celles prises par le coeur sont plus souvent assumables on dirait.

J’imagine que ça va revenir une fois de temps en temps me titiller l’utérus.

Et puis, je regarde mes deux enfants.

Juste là. Plein de vie.

Le petit dernier est propre.

On a fait un marathon de Shrek dernièrement.

Je peux enfin sortir sans un sac à couches gros comme une poche d’hockey.

On voyage.

Je veux leur faire visiter le monde.

On joue à des jeux de société.

Ils vieillissent.

Et puis moi aussi. Je le réalise dernièrement.

J’en veux un petit peu à mon corps, et à la vie.

Pour ce dernier bébé que je n’aurai jamais eu.

Author: l’Emmèredeuse

L’emMÈREdeuse, c’est moi : Catherine.
Maman de deux (petits monstres) adorables garçons : Tom le dresseur de loups et Henri le Bébé Loup.
Je suis copropriétaire d’une famille recomposée remplie d’amour et de folie.
Ma plume prend parfois des chemins humoristiques, parfois des plus sérieux, mais toujours ceux de l’authenticité et de l’humilité.
Maman Louve à mes heures. Je partage avec vous les petits et grands moments de mon quotidien de maman.
De maman ben ordinaire.
Qui travaille à temps plein … Pis qui fait son gros possible.